La compensation de deux millions de livres sterling versée aux propriétaires - et non aux esclaves - illustre la cruelle ironie de cette "justice". L'apprentissage qui suivit ne fut qu'un artifice légal perpétuant la servitude sous d'autres formes. Dans les anciennes propriétés sucrières, la liberté n'existait que sur le papier.
De Roche Bois à Sainte-Croix, de Batterie Cassée a Cité St Clair, de Barkly a Cité Kennedy la géographie actuelle de nos quartiers défavorisés dessine encore les contours de cette histoire mal cicatrisée. Le Morne Brabant, témoin silencieux du sacrifice des marrons, nous rappelle le prix terrible payé pour cette liberté.
Aujourd'hui, alors que Maurice s'enorgueillit de ses succès économiques, les disparités sociales persistantes témoignent d'une émancipation inachevée. Notre devoir de mémoire exige plus que des commémorations rituelles. Il appelle à une véritable politique de réparation sociale, pour que la liberté formelle de 1835 devienne enfin une réalité tangible pour tous les Mauriciens.
J.J.P