1. En quoi consiste votre métier ?
Je suis Executive Assistant Manager au Le Méridien Île Maurice. Je gère toutes les opérations de l’hôtel et assiste le Directeur Général dans ses tâches.
2. Pourquoi avez-vous choisi le tourisme et quel est votre parcours professionnel ?
Le tourisme m’a choisi et j’en suis tombée en amour. Je voulais devenir psychologue, mais étant issue d’une famille modeste et faute de moyens financiers, la seconde option était le tourisme. Après des études en Management à l’École Hôtelière de Maurice, où je termine major de ma promotion, je commence ma carrière en tant qu’hôtesse de l’air pour la compagnie nationale. Au bout de deux ans, je retourne à l’hôtellerie en tant que stagiaire de direction au One&Only Le Saint Géran. Je bouge par la suite au One&Only Le Touessrok en tant qu’Assistante de Direction, puis Gouvernante. En 2005, je rejoins le groupe Beachcomber où pendant 17 années j’évolue de Gouvernante Générale au Dinarobin Beachcomber Golf Resort & Spa à Directrice d’Hébergement au Royal Palm Beachcomber Luxury. En 2022, je rejoins le groupe Marriott International en tant que Directrice des Opérations, d’abord au Westin Turtle Bay, puis au Le Méridien Île Maurice.
4. Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans l’exercice de votre métier ?
En tant que femme, et mère célibataire, le défi est de pouvoir concilier les responsabilités professionnelles et celles de maman de deux adolescents. Jongler son emploi du temps afin de pouvoir répondre aux besoins des deux côtés.
Quant à la profession elle-même, la difficulté majeure reste le recrutement dans le secteur. La main-d’œuvre est de plus en plus rare. Les jeunes passionnés d’hôtellerie peu nombreux.
5. Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui voudrait faire la même carrière que vous ?
Surtout de foncer. Les jeunes boudent l’hôtellerie souvent pour le sacrifice que cela demande par rapport à la vie sociale. Paradoxalement, et du fait du manque d’intérêt pour ce secteur, il existe énormément d’opportunités et de perspectives de carrières pour ceux qui veulent se donner la peine et qui ne rechignent pas sur le travail.
6. Pensez-vous que le rôle de la femme est suffisamment valorisé dans le tourisme ?
Le mot important dans cette question est « suffisamment » et je dirais que non.En plus d’être multitâches, avoir le sens de l’organisation et de la gestion de crises, les femmes possèdent, pour beaucoup, des qualités naturelles qui devraient être davantage mises en avant dans un secteur qui gère principalement l’humain : la sensibilité, l’intuition et l’empathie. En d’autres mots une intelligence émotionnelle innée.
Ces qualités ne reposent pas nécessairement sur du concret et ne sont pas facilement mesurables. Les résultats seraient l’attestation de la mise en œuvre de ces qualités. Mais encore faudrait-il leur donner la latitude de les mettre en pratique et témoigner la confiance dans leur effet.
La valorisation de la femme n’est pas seulement de fêter en grande pompe la journée de la femme le 8 mars, mais de la place que nous lui faisons au quotidien, la confiance que nous lui témoignons et les facilités qui lui sont mises à disposition afin de pouvoir exercer son métier dans les meilleures conditions possibles.
J’ai participé récemment à un forum sur le sujet et il semblerait que nous soyons confrontés à deux cas de figures : a) les facilités dans les entreprises existent mais ne sont pas mis en avant – donc un manque d’information ; b) les entreprises ont peu ou pas d’actions concrètes pour la valorisation des femmes.
Ces actions, quand elles existent sont l’objet de décision propre à l’entreprise alors qu’il faudrait engager un vrai débat au niveau national.
7. Avez-vous le sentiment que vous devez faire deux fois plus qu’un homme pour vous imposer dans votre métier ?
Dans un monde idéal ; absolument pas. Au contraire, je pense que ce serait une erreur. La femme devrait s’imposer autrement, par les qualités qui lui sont propres et évoluer en complémentarité avec les qualités plus typiquement masculines.
Dans la réalité, je dirais que cela dépend de qui vous rencontrez sur votre route.
J’ai eu la chance dans ma carrière de travailler avec quelques directeurs qui valorisaient les femmes et qui avaient dans leurs équipes de direction, une parité parfaite, voire plus de femmes. Je ne peux pas me plaindre. Cependant, c’est loin d’être la norme dans ce secteur.
8. Comment arrivez-vous à concilier votre travail avec votre rôle de femme/mère/épouse ?
Mes enfants sont quasiment nés et ont grandi dans des hôtels. S’ils comprennent parfaitement les raisons de mes longues heures de travail et mes impératifs, ils n’en ressentent pas moins mes absences. Je fais en sorte de privilégier la qualité à la quantité. Nous nous écrivons et nous nous appelons pendant la journée.
J’ai par moment mis ma carrière en second plan et refusé des postes de Directrices d’hôtel plusieurs fois parce que les conditions y attachées auraient été au détriment de ma famille. Mes décisions pour tel ou tel poste ne se sont jamais faites dans mon seul intérêt mais en consensus de mon entourage.
Je dois toutefois souligner que sans le soutien de ma famille et celui de mes directeurs successifs, j’aurais sans doute déjà quitté l’hôtellerie pour un métier ‘de bureau’, moins satisfaisant mais aux horaires moins contraignants. Grâce à eux, j’ai pu compter sur une certaine flexibilité / facilités qui m’ont aidé à faire face aux petits et grands tracas de la vie. J’en profite pour leur en témoigner toute ma gratitude.
9. Avez-vous un role model (local ou international)?
Je pourrais vous citer plusieurs personnalités inspirantes, pour qui j’ai du respect et de l’admiration. Par exemple Nelson Mandela, Mère Teresa, Michelle Obama, Oprah Winfrey, Jay Shetty et la liste est longue.
Mais je ne pourrais pas en désignant un/une comme LE rôle model.
10. Quelles sont vos passions ?
La chanson. C’est mon exutoire. Je chante tout le temps. D’ailleurs on me demande souvent si c’est mon métier lorsque je dis que je travaille à l’hôtel. Ce sera certainement ce que je ferai à ma retraite.
11. Gourmande ou gourmet ?
Les deux. Je suis à la fois gourmande et gourmet. J’ai grandi dans une famille qui aime la bonne chair. Couplé à cela, mon parcours professionnel fait que j’ai été initiée et habituée à la cuisine gastronomique. Difficile donc d’y échapper. Toutefois, je sais autant apprécier un bon mine bouilli qu’un plat étoilé Michelin.
12. Quelle a été, pour vous, la plus grande avancée féminine de ces 10 dernières années.
Les femmes accèdent plus facilement aux postes à responsabilité de nos jours. Les lois internationales évoluent petit à petit pour donner la possibilité aux femmes de tenir leur rôle de mère sans avoir à sacrifier leur carrière. Il est maintenant admis dans les mœurs que les tâches ménagères ne sont en aucun cas une affaire de genre.
13. Quelle est la place du sport dans votre vie ?
Quasi nul depuis la reprise post-Covid. Je dois m’y remettre. C’est ma résolution pour 2024.
14. Le dernier livre que vous avez lu ?
Le Secret de Rhonda Byrne et en ce moment c’est Think like a monk de Jay Shetty. J’aime tout ce qui touche au Mindfulness.
15. Quel est l’endroit que vous préférez le plus à Maurice ?
Je tricherais et dirais Rodrigues. C’est synonyme pour moi de déconnexion. Pas de mail, pas de téléphone, pas de télévision ou de mall. Idéal pour se ressourcer, retrouver le contact avec la nature et la simplicité.