Elles sont 18 femmes, la plupart des mères de famille, certaines ne sachant ni lire ni écrire, à avoir suivi pendant sept mois, cette formation qui s’est déroulée au Glamis Business School. Le projet s’adresse tant aux femmes qui souhaitent développer leurs petites entreprises existantes, que celles qui projettent de s’engager dans l’entrepreneuriat. Le but est triple : former, accompagner et encourager les apprenantes, afin qu’elles puissent acquérir les compétences essentielles pour être des entrepreneures autonomes, et améliorer leurs conditions de vie.
La formation, assurée par des professionnels de l’entrepreneuriat, repose sur cinq piliers : le grooming, la confiance en soi, la communication, le business plan, le budget, ainsi que le marketing et la vente. Chaque journée de formation comprend des présentations interactives, des discussions de groupe, des moments de partage, mais aussi des activités pratiques telles que l’analyse SWOT, les 4P indispensables à une campagne marketing, et l’apprentissage à l’informatique, notamment les logiciels Power Point et Canva. A la fin du parcours, chaque participante devait créer une présentation power point de son business plan et la présenter à un jury.
«Nous sommes conscients que l’accès au financement est l’un des principaux obstacles auxquels font face les femmes qui souhaitent lancer leurs petites entreprises pour gagner leurs vies et soutenir leurs familles. Le lancement du WEP, en partenariat avec l’UE, est parti de ce constat. Notre priorité à travers ce programme est d’accompagner ces femmes entrepreneures, les soutenir et faire grandir leurs activités. Je tiens à exprimer tous mes remerciements à l’UE pour son soutien à la réalisation de ce projet» déclare Karine Perrier Curé, Chief Brand & Communication Officer de Beachcomber Resorts & Hotels, et Chairperson de la FED. « Nous avons commencé le programme avec 25 femmes micro-entrepreneures et elles sont 18 à l’avoir complété. C’est impressionnant, ce qu’elles ont accompli en seulement 7 sept mois. Nous sommes tellement fiers de leur assiduité et de leur persévérance, ainsi que de l’esprit d’entraide dont elles ont fait preuve.»
Des propos que partagent Viren Vythelingum, CSR Manager du Groupe Beachcomber. « Nous avons conçu cette formation pour l'entrepreneuriat avec l'idée d'accompagner des femmes issues pour une majorité de milieux vulnérables, dans le but de leur permettre de développer une confiance en elles-mêmes et de s'émanciper, tout en les outillant pour qu'elles puissent non seulement améliorer leur propre situation financière, mais aussi contribuer à l'amélioration des conditions de vie de leurs familles», declare-t-il.
Entraide et solidarité. Deux mots riches de sens pour cette première promotion du WEP. Elles s’appellent Syjane, Aurelie, Jenna, Emy, Charlotte et Marie Lysette. Ces femmes, originaires de Cité La Cure, La Gaulette, Camp Levieux, Plaisance, et Trou d’Eau Douce, sont parmi les 18 participantes ayant achevé avec succès la formation. Toutes ont obtenu un Seed Capital de la FED.
Les panda cakes de Syjane
Gâteaux d’anniversaire, tartelettes, cupcakes, napolitaines, génoise puits d’amour. Ce sont là quelques-unes des pâtisseries confectionnées par Syjane Victoire. « Je fais des gâteaux sur commande pour pouvoir élever mes deux enfants et les envoyer à l’école. Avant, je travaillais dans une pâtisserie à Ste Croix, mais après la naissance de mes enfants, j’ai dû tout arrêter », confie cette mère célibataire de 26 ans, habitante de Résidence La Cure.
Depuis quelque temps, Syjane a aussi installé une petite vitrine devant sa porte où elle vend ses gâteaux faits maison. Comme plusieurs autres bénéficiaires, la jeune femme a entendu parler du WEP à travers la National Empowerment Foundation (NEF). « Cette formation m’a appris à utiliser les réseaux sociaux pour me faire connaître, à innover pour être compétitive, et à gérer un budget. Aujourd’hui, j’ai une page Facebook ainsi qu’un compte WhatsApp Business, où je partage les photos de mes créations. J’ai aussi lancé mes pâtisseries en forme de panda, qui sont très appréciées des clients. Je suis la seule pâtissière à Résidence La Cure à proposer ces gâteaux ! », précise-t-elle tout sourire. Dans le cadre de ce programme, Syjane a aussi appris à créer et à faire une présentation PowerPoint. « Moi qui suis de nature très timide et qui n’osais jamais ouvrir ma bouche quand j’étais à l’école, je suis venue présenter mon business à un jury ! Mieux encore, j’ai réussi à les convaincre ! ».
À l’époque, Syjane traverse pourtant des moments difficiles. « Ma fille était admise à l’hôpital. Mais, malgré cela, j’ai tenu bon, travaillant ma présentation PowerPoint tout en étant à son chevet. Aujourd’hui je suis tellement heureuse d’avoir réussi », sourit-elle. Avec le Seed Capital, Syjane compte acheter un four, un batteur, ainsi que des ingrédients de base pour pouvoir constituer un stock. « Bientôt, j’aurai aussi ma pâtisserie », annonce-t-elle.
Ouvrir mon salon de coiffure à Résidence La Cure
Aurélie Pauline, 27 ans, a aussi un projet bien défini en tête. « Mon rêve est d’avoir mon salon de coiffure. » Aurélie est la voisine de Syjane à Résidence La Cure. Jeune maman de cinq enfants qu’elle élève seule, Aurélie a quitté l’école alors qu’elle avait à peine 9 ans, sans savoir ni lire ni écrire. « Depuis l’enfance, je suis passionnée par la coiffure. D’ailleurs, souvent des femmes de mon quartier me sollicitent pour faire leurs tresses ou poser leurs extensions. » Néanmoins, les revenus découlant de cette activité étant largement insuffisants, Aurélie travaille comme maçon sur des chantiers de construction pour subvenir aux besoins de ses enfants.
Animé par l’envie d’avancer et de réussir, elle s’est inscrite au WEP, pour apprendre les bases de la création d’entreprise. Mais, la jeune femme fait face à une barrière, qui lui semble insurmountable. « Comme je ne sais ni lire ni écrire, je me disais que je ne pourrais jamais présenter mon business plan au jury», se rappelle-t-elle émue.
Quelques moments de doutes et de peur, mais qui seront apaisés grâce au soutien des encadrants du projet et à la solidarité de ses camarades de cours. « Elles m’ont toutes soutenue. Je suis particulièrement reconnaissante à Syjane. Elle a fait un enregistrement audio de ma présentation, que j’ai écoutée et réécoutée afin de pouvoir la présenter au jury. Et au final, mon projet a été accepté ! » lâche-t-elle, soulagée et heureuse.
Le Seed Capital lui permettra de financer son projet de salon de coiffure. « Pour la toute première fois, j’ai vraiment le sentiment de progresser ! » Aujourd’hui, celle qui assume à la fois le rôle de mère et de père auprès de ses enfants est déterminée à sortir de l’analphabétisme.
Marie Lisette vise l’exportation
C’est cette même détermination qui anime Marie Lisette Sansquartier. Agée de 45 ans, cette habitante de La Gaulette, mariée et mère de trois enfants est une passionnée de l’artisanat. Elle fait d’ailleurs partie des artisans du programme Beautiful LocalHands, mené par la FED. Marie Lisette travaille surtout avec les coques de noix de coco, qu’elle transforme en sucriers, bougeoirs, porte-savonnettes, et coffrets. Ses produits sont vendus à la boutique Beautiful localHands, mais aussi dans la petite échoppe qu’elle tient sur l’île aux Bénitiers. C’est à travers la FED qu’elle entend parler du WEP.
« Durant les premiers jours de la formation, j’étais très timide. Assise dans les dernières rangées, j’étais terrorisée à l’idée de devoir prendre la parole », se souvient-elle. Au fil du programme et encouragée par ses formateurs, Marie Lisette apprend à se faire confiance, à s’affirmer et à se fixer des objectifs pour avancer. « Autrefois, lorsque des touristes anglais s’approchaient de mon échoppe sur l’île aux Bénitiers, je me cachais à l’arrière pour éviter qu'ils ne me voient et s'éloignent, étant donné que je ne parle pas anglais. Cependant, aujourd’hui, je les accueille en leur disant Good Morning et leur montre mes produits. Bien que je ne maîtrise toujours pas la langue anglaise, je me débrouille pour me faire comprendre et leur proposer mes créations. » Fière du Seed Capital, Marie Lisette compte élargir sa collection et se lancer dans l’exportation.
Les bougies parfumées d’Emy
Les yeux rieurs, l’air juvénile, Emy Milate, 24 ans, a lancé Lalimyer, sa petite entreprise l’an dernier. Après six ans dans le domaine de l’administration et de la relation clientèle, au sein du secteur financier, elle a choisi de se mettre à son compte. Sa spécialité, la création artisanale de bougies parfumées.
C’est dans la maison familiale à Plaisance que cette créatrice dans l’âme fabrique ses bougies. «L’idée m’est venue après les deux confinements. Je voulais proposer des produits qui permettent aux gens de décompresser. Or quoi de mieux que des bougies parfumées pour créer une ambiance chaleureuse et réconfortante. C’est ainsi que ma petite entreprise a vu le jour en 2023», raconte-t-elle. Pour se perfectionner, Emy enchaîne les tutos sur YouTube. «J’ai essayé, souvent raté, puis réessayé jusqu’à ce que le résultat me plaise.»
A travers l’un de ses amis, elle entend parler du WEP. « J’ai postulé la veille de la date butoir et ce fut vraiment une belle surprise, lorsque j’ai reçu cet appel de la FED m’annonçant que ma candidature avait été retenue. »
Depuis sa vie de jeune entrepreneure a connu une belle transformation. «C’est cette formation qui m’a permis d’acquérir les aptitudes essentielles pour gérer une petite entreprise et assurer sa durabilité.» Aujourd’hui, Emy propose tout un choix de bougies à base de cire de soja, qui peuvent être commandés sur sa page Facebook. Avec son Seed Capital, elle espère aménager très bientôt sa fabrique de bougies et s’y consacrer pleinement.
Jenna, coiffeuse à domicile
Jenna Soiris, 37 ans, est coiffeuse à domicile. Chaque jour, cette résidente de Trou d’Eau Douce parcourt à pied, en bus ou en taxi les villages de l’est pour se rendre chez ses clients et leur offrir des services tels que coupes, brushing, coloration, balayage et traitement capillaire. « Ma sœur possède un salon de coiffure à Rose-Hill et c’est d’elle que je tiens ma passion pour ce métier », confie-t-elle.
La jeune femme a travaillé pendant plusieurs années dans des salons d’esthétique et d’onglerie. Puis, il y a un an, elle a lancé Elegancia, sa petite entreprise de coiffure à domicile. « Ma première cliente était une de mes amies. Elle ne pouvait pas se déplacer et m’avait demandé de venir chez elle pour lui faire une coupe. J’ai tout de suite su que c’est ça que je voulais faire », raconte-t-elle. De bouche à oreille, cette maman de 4 filles s’est constitué une base de clients fidèles.
L’entrepreneuse veut maintenant voir plus grand et aller plus loin. « Il m'arrive parfois de devoir refuser des demandes de clients car je n'ai plus certains produits en stock, comme par exemple pour une coloration ou des soins capillaires. Grâce au Seed Capital, tel ne sera plus le cas à l’avenir. Dorénavant, je pourrai investir dans les accessoires et les produits essentiels pour répondre aux attentes de mes clients. »
La reconversion professionnelle de Charlotte
Charlotte Simathree Appegadoo a choisi la reconversion professionnelle. Après une carrière de 15 ans dans les centres d’appel, elle fait le choix en mai de l’année dernière de devenir entrepreneure et de lancer sa fabrique de délicieux gâteaux faits maison. « J’ai toujours été passionnée par la pâtisserie. D’ailleurs, même lorsque je travaillais en centre d’appels, je passais mes week-ends à essayer de nouvelles recettes et souvent les lundis je régalais mes collègues avec mes gâteaux. » Les boîtes de douceurs se vident d’ailleurs très vite.
Non seulement ses collègues l’encouragent, mais ils lui passent aussi des commandes de gâteaux. Petit à petit, les demandes augmentent. « Je passais mes week-ends, mes soirées, et parfois même des nuits entières aux fourneaux pour honorer les commandes. ». Pour cette maman de deux jeunes enfants, il devient très vite évident qu’elle devait choisir entre son travail au centre d’appel et sa petite entreprise.
Le 31 mai 2023, Charlotte Sweet and Treats est officiellement lancée. Très vite, la petite entreprise prend de l’ampleur. Au-delà des gâteaux, elle se lance dans la livraison des boxes de petit-déjeuner. « Ma seule contrainte, c’était la capacité de production, car je travaillais de ma cuisine, avec mes ustensiles et mon matériel de bord. » C’est un proche qui attire l'attention de Charlotte sur une publication Facebook de la FED sur le WEP. « Ce projet a changé ma vie », dit-elle dans un grand éclat de rire. « J’ai lancé ma petite entreprise, guidée par ma passion pour la pâtisserie, mais je n’avais aucune notion des bases de l’entrepreneuriat. Je n’avais ni business plan, ni plan marketing, ni budget. Le WEP m’a permis d’acquérir les bases pour gérer mon entreprise et la faire prospérer. Aujourd’hui, au-delà d’être une pâtissière, je suis aussi une cheffe d’entreprise », affirme-t-elle fièrement. Charlotte utilisera son Seed Capital pour l’achat d’un four et d’un batteur industriels.
La FED a pour objectif de former 50 femmes à l’entrepreneuriat dans le cadre du WEP.